par Frédéric Della Giusta
Nous étions quasiment une vingtaine de personnes à répondre au double appel de l’ANY et de la Réserve Naturelle des Etangs et Rigoles d’Yveline rattachée à l’Ile de Loisirs de Saint-Quentin-en-Yvelines et qui englobe depuis avril 2021 l’ancienne Réserve naturelle nationale de Saint-Quentin-en-Yvelines.
Si vous êtes rompu aux organisations en poupées russes et à l’aise avec la description qui précède, tant mieux. Si vous n’avez pas tout suivi, ce n’est pas très grave car le sujet de la journée était... le champignon. Encore et toujours. Ceci dit, je reformule, pour garder tout le monde à bord de ce compte-rendu : les champignons se trouvent dans la Reserve de Saint Quentin en Yvelines, qui fait désormais partie de la Reserve Naturelle des Etangs et Rigoles d’Yveline, est gérée et se situe géographiquement à l’Ile de Loisirs. Tout s’éclaire quand on prend le temps d’expliquer.
Mais revenons à nos champi-moutons, objet de toutes nos convoitises et de cette sortie. Avant d’entamer la description de ce monde fantastique qui s’offrait ce samedi à la découverte de notre groupe essentiellement composés de jeunes padawans, commençons par rappeler qu’il faut être correctement armé pour l’affronter sans peur. Parmi les nombreux guides de mycologie qui fleurissent les étagères des bonnes librairies, trois d’entre eux sont particulièrement recommandables à qui souhaite un kit de survie raisonnable, ni trop léger, ni trop indigeste ; il s’agit de :
Le choix entre l’un des trois est affaire de préférence personnelle. Il est conseillé d’aller dans une grande librairie et de feuilleter ces ouvrages, puis de choisir celui qui fait écho à sa sensibilité (photos versus dessins, complétude de l’information versus compacité). Et quand on aime, on ne compte pas : j’ai les trois.
En ce samedi donc, la température est relativement clémente avec 10 degrés, un ciel bleu et un rayon de soleil, mais le ressenti est inférieur, sans doute en raison de l’humidité et de l’ombre apportée par les sous-bois dans lesquels nous évoluons. Avant même de commencer la visite de la réserve proprement dite, dont l’histoire nous est contée par Cyril, sympathique maître des lieux, on découvre une espèce intéressante poussant sur les blocs de bétons délimitant les places de parking, parmi les mousses : Arrhenia rickenii, jolie petite omphale beige foncé d’environ 2 cm de hauteur, gracieuse, à lames fourchues et chapeau strié.
C’est l’occasion de préciser à tout notre auditoire, composé pour la majorité de néophytes, que les champignons sont désignés par un nom (réputé) latin constitué d’un nom de genre (ici Arrehnia) en majuscule, suivi du nom d’espèce(ici rickenii). Pour approfondir ses connaissances de l’histoire se cachant derrière l’usage de ces noms binomiaux, on pourra butiner sur le web et sur wikipedia en particulier. On n’en dira pas plus ici.
Une fois dans le périmètre de la réserve close de hautes barrières, on attaque la visite par la face nord... au sens figuré évidemment, c’est à dire par un os. En effet, nous accueille une psathyrelle, genre redoutable qui nécessite souvent l’usage du microscope pour étudier les différents caractères (taille et forme des spores, présence taille et forme de cellules caractéristiques nommée cystides, etc). Notre psathyrelle d’ailleurs restera sans nom, faute de temps pour pousser l’étude même revenus à la maison. Pour réviser le chapitre précédent, disons qu’on sait déterminer facilement le genre de ce champignon (Psathyrella) par sa silhouette reconnaissable et ses lames noirâtres, mais on ne saura pas dire de quelle espèce il s’agit (Psathyrella corrugis ? Psathyrella pseudogracilis ? autre ?). La mycologie, ce n’est pas toujours aussi facile que de faire rissoler une poêlée de giroles...
Et comme pour nous défier davantage, la réserve enchaine en nous proposant un champignon du genre Melanoleuca, autre genre redoutable qui reste affaire des plus intrépides spécialistes. Il aura fallu plus de deux heures de microscopie et de consultation d’ouvrages spécialisés pour proposer comme nom Melanoleuca polioleuca, avec un taux de certitude d’environ 90%... On n’a rarement de certitudes avec certains genres difficiles. C’est parfois frustrant, mais c’est ce qui donne son charme à la mycologie !
Le reste de la visite pose moins de problèmes, ou devrais-je dire, moins de problème à Etienne, ceinture noire 5e Dan et Grand Maître es champignons. Parmi les espèces notables répertoriées, citons :
58 espèces ont été identifiées au final (voir la liste des espèces observées), ce qui est honorable en cette saison mycologique qui touche à sa fin. Les première gelées signent en effet la fin de la partie pour la majorité des champignons. Ne restera guère que les hygrophores pour combler notre envie irrésistible de champignons. Et le hasard et l’ANY faisant bien les choses, la prochaine sortie ce dimanche 14 novembre leur est dédiée.
La diversité des espèces inscrite ce jour à notre inventaire permet d’ailleurs d’expliquer à l’auditoire captivé qu’il existe trois catégories de champignons :
Quel monde fantastique !
La visite s’achèvera par un satisfecit exprimé par l’ensemble des membres du groupe quand à l’intérêt et la richesse de la sortie, et par la promesse, comme entre amis à chaque fin de vacances, qu’on se reverrait bientôt.