par Frédéric Della Giusta
Les champignons emblématiques de la fin d’année dans les Yvelines sont, sans conteste possible, les hygrophores. Un article richement illustré leur sera d’ailleurs prochainement consacrés. En attendant, on pourra se référer au Champignon de Novembre 2019 pour quelques photos mettant en appétit, avec notamment l’étonnant Hygrocybe coccinea, l’Hygrophore écarlate.
Autre splendeur apparaissant fin Décembre, Sarcoscypha coccinea, sublime cupule à la robe rouge, mais qui avait déjà eu les honneurs du Champignon de Février 2020.
Rouge encore... Il nous aurait fallu un troisième champignon rouge pour ne pas faire mentir l’adage "jamais deux sans trois". Amanita muscaria, l’amanite tue-mouche ? Non, les dernières se rencontre en Novembre. Il est en de même des russules rouges, dont la dernière de l’année Russula sardonia, la Russule sardoine, a été trouvée sous les rares pins de la forêt de Marly début Novembre. On ne parle pas non plus de Fustilina hepatica, la langue-de-boeuf, qui ne se montre guère au delà de la mi-Octobre.
Rouge, la couleur des cardinaux... Fallait-il donc viser plus haut et envisager un champignon à la couleur de la robe papale, le blanc immaculé ? Le candidat tout trouvé eut été Hygrophorus virgineus, l’hygrophore blanc de neige. Mais nous voila à nouveau dans le groupe des hygrophores, nous le réservons donc pour l’article précédemment cité.
Il fallait donc trouver un champignon d’exception pour rester dans la lignée de ces champignons remarquables. Trouver un thème d’abord... Décembre, Noël, Sapin de Noël... Euréka ! Nous choisirons un champignon lié aux sapins. Mais le sujet est vaste, et on a dit qu’il nous fallait quelque chose d’exceptionnel... Et bien prenons un champignon des cônes de conifères, c’est à dire, poussant sur les "pommes de pins". Le sujet n’est pas souvent traité.
Et pourquoi se limiter à un seul champignon, d’ailleurs ? L’entorse à la règle "Champignon du mois" est réelle, mais pas mortel. Allez zou, Banco !
Nous mettons donc à l’honneur ce mois-ci trois champignons poussant sur les cônes de conifères !
1 - Baeospora myosura - la Collybie queue-de-souris
Trouvée régulièrement sur les cônes de pins lors des sorties mycologiques en forêt de Rambouillet, cette petite collybie atteint difficilement les 3 cm de diamètre. Elles sont souvent plusieurs à se partager le même cône et dans ce cas font à peine plus d’un centimètre de diamètre.
Le chapeau est de couleur brun, beige à ocre, plus clair au bord. Les lames sont échancrées, blanchâtre. Le pied, brun ochracé, est recouvert d’une pruine pâle bien visible surtout à la loupe, ce qui en fait un excellent critère pour le distinguer d’autres champignons des cônes de pins.
Les spores sont très petites, de 3 - 4,5 x 1,5 - 2 µm. D’où le nom de ce champignon, baeospora venant du grec : -baios (petit) + -spora (spore).
On trouve cette collybie également sur cône d’épicéa. L’épicéa étant trop rare dans les Yvelines, cette photo a été prise dans le Jura ce mois de Décembre, comme la photo précédente d’ailleurs, d’où le lit de neige qu’on observe sous le cône de pin.
2 - Strobilurus esculentus - la Collybie des cônes d’épicéa ou Collybie comestible
Les épicéas du Jura nous ont offert un autre champignon des cônes en cette fin Décembre : Strobilurus esculentus. Il est à noter que ce champignon a déjà été observé - mais rarement - lors des sorties de l’ANY, en forêt de Rambouillet dans une parcelle plantée d’épicéa et à l’Arboretum de Chèvreloup fin Octobre 2015.
Coïncidence curieuse, on l’a observé ce 04 Janvier 2021 à l’Etang-la-Ville sur les cônes d’un épicéa dans un jardin privé sans doute replanté là après un Noël il y a une quarantaine d’année. Comme quoi, il n’est pas besoin d’aller chercher à l’autre bout du monde ce qu’on peut avoir dans son jardin !
Le terme Strobilurus est dérivé du latin strobilo qui provient lui-même du grec ancien ÏƒÏ„Ï ÏŒÎ²Î¹Î »Î¿Ï‚, stróbilos, signifiant entre autres "cône de conifère". Le terme Esculentus vient également du latin et signifie "mangeable, comestible".
Le chapeau peut revêtir différentes couleurs, allant du brun-bai au beige-gris comme ici, voire même blanc. Les lames sont adnées à plus ou moins échancrées, de couleur blanchâtre à crème. Le pied est finement velouté (là encore, la loupe peut aider), et blanc en haut, brun ochracé en bas, ce qui représente un caractère déterminant à retenir.
3 - Mycena seynii - La Mycène de De Seynes ou Mycène des cônes de pin
Le troisième champignon des cônes de conifères est plus rare, trouvé en Forêt de Dourdan (et jusque sur les îles grecques, en l’occurrence Thassos d’où nous vient cette photo partagée par Jérôme Maffert).
Cette mycène tient son nom de Jules de Seynes, botaniste et mycologue héraultais, président de la Société Botanique de France en 1877 et 1887. On la trouve essentiellement sur pin maritime (Pinus pinaster), principalement sur les cônes mais quelques fois aussi sur les débris de l’arbre, aiguilles et branches mortes.
C’est une élégante mycène (élégante... comme toutes les mycènes !) rose pourpre, au chapeau strié, aux lames rose pâle à arête pourpre. Le pied est concolore au chapeau, et hérissé à sa base de poils mycéliens blancs.
4 - D’autres champignons des cônes de conifères
Il n’est pas l’objet ici de recenser tous les champignons des cônes de conifères. On trouvera ceci très bien fait avec de jolies photos sur le site Pharmanatur.
On donne ici les principaux champignons aperçus lors des sorties mycologiques de l’ANY afin de se convaincre, s’il en était encore besoin, qu’on y fait des rencontres stupéfiantes et vraiment dignes d’intérêt pour qui s’émerveille des créations de Dame Nature.
Références