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Parc de Marly, 27 novembre 2022

Sortie mycologique

Par Étienne Varney

« Sire, Marly ? »

Louis XIV ne conviait que quelques proches dans ce lieu d’exception. Même des membres de la famille royale n’y avait pas un accès automatique. Et la supplique « Sire, Marly ? » ne faisait que peu d’élus. (Mémoires de Saint-Simon)

« Le château de Marly du côté des Jardins », Adam Pérelle

Frédéric a simplifié un peu le protocole ; quelques privilégiés viendront pour cette promenade dominicale. Les bristols d’invitation sont quand même vérifiés scrupuleusement à l’entrée du Domaine ; c’est en effet son anniversaire ; il arrive majestueux sous les hourras de la foule. La fête peut commencer. Pas de bal, pas de champagne ; juste un café chaud avec des chouquettes et un peu de fromage truffé ! Puis une promenade sur les pelouses du parc qui peuvent recéler de magnifiques trésors.

La Vénus callipyge et la Diane chasseresse ont revêtu leur habit d’hiver. Nous attendrons le printemps pour admirer leurs formes gracieuses et dénudées. Pour ne pas risquer d’être frappé par des foudres féministes, j’ajouterai qu’il doit y avoir aussi quelques Apollons. Les belles statues ne se découvrent pas mais arpentons donc les pelouses.

Pelouses du parc

Des Hygrophores.

Mais que sont ces Hygrophores tellement attendus ? « Un truc très joli ; Frédéric et moi en sommes tombés amoureux ». Pour une définition plus précise et plus scientifique, on se reportera au magnifique article sur le sujet du discret Frédéric.
Le héros du jour avait aussi présenté lors d’une sortie récente, un ouvrage dédié aux splendides Hygrocybes* ; les prairies alors n’avaient montré qu’une seule espèce. Et rendez-vous était pris dans des lieux plus propices.
On sent l’anxiété chez les participants, l’excitation chez d’autres. Le silence est de mise. Presque religieux. Qui aura la primeur ? La saison mycologique n’a pas été formidable après ces périodes de sécheresse. Les verra-t-on ? Soudain un cri strident dans la bruine matinale ! « Un truc rouge. »

Et c’est le début d’un festival de couleurs et de formes que beaucoup ne soupçonnaient point :
  Un rouge, très visqueux, Hygrocybe mucronella ; une franche amertume quand on met la langue en contact de la cuticule ; il faut parfois se sacrifier ; trop dur à 9h du matin ; là, Frédéric regardera ce midi, les spores « en forme de Barbapapa (le dessin animé) » et confirmera
  Un autre, ressemblant au précédent mais à chair douce, à la fois jaune et rouge et surtout avec du rouge en haut du pied, Hygrocybe insipida
  Un vert, Gliophorus psittacinus (Hygrophore perroquet) ; celui-ci a changé de genre comme pour indiquer qu’il était très visqueux
  Ce gros jaune, avec des lames au reflets orangés, Hygrocybe quieta
  Des blancs au lames épaisses bien décurrentes, Cuphophyllus virgineus
  Hygrocybe constrictospora, au chapeau rouge à centre jaune ; ses spores ont une silhouette en forme de 8, tout en rondeurs ; mes mains dessinent la figure ; Du calme, Étienne ; mais je resterai quand même au café.

Montage Frédéric S : quieta, mucronella, psittacinus, arvensis, insipida, conica, virgineus, constrictospora

Il est à noter qu’on mesure dans certaines contrées (Grande Bretagne…), le nombre d’espèces d’hygrophores pour estimer le niveau patrimonial de ces milieux particuliers que sont les pelouses rases**. Ici, on est pour moi sur un « hot spot » en termes de biodiversité fongique.
Je ne les cite pas tous ; au total, une douzaine d’espèces d’Hygrophores ; c’est la fête.

***

Et puis

Quelques entolomes, gris sombre, Entoloma kuehnerianum à l’odeur d’huitre.
De graciles galères jaunes ochracées.
Ainsi qu’une belle collection de Mycènes dont certaines sont identifiables en macro :
  la gracile Mycena acicula millémétriques qui rentre en concurrence pour le concours de la plus belle, de la plus sexy avec certaines Hygrocybes cités
  de minuscules Mycena hiemalis, blancs qui montent la face nord d’un arbre de la prairie
  Mycena flavoalba, blanc à jaune pâle, classique dans ces pelouses.

Des Têtes de moine de grande taille, en forme de vase, tellement grands qu’on les voit depuis un promontoire à une cinquantaine de mètres ; ils permettent de s’arrêter quelques instants ; et Fréd soufflera la bougie :

Une bougie dans un géotrope

Il n’y a pas eu, une fois n’est pas coutume, de préalable géologique : les terrains ont été trop remaniés pour que cela ait un sens. Sous les pelouses, le reste d’anciennes constructions, ont rendu le terrain parfois calcaire, parfois non.

Epilogue

Au retour, certains ramassent « quelques » pieds violets (Lepista saeva) qu’on avait repérés au début dans la première pelouse ; pour l’étude.

Lepista saeva

Le petit groupe s’égaille
Non sans avoir échangé
Une dernière fois
Sur ces merveilleux trésors
Que recèle le parc de Marly
Malgré le temps humide
Nous en sortons changés
Plus heureux
Une de ces sorties
Qui restent dans la mémoire
Le coeur serré car
C’est la dernière de la saison
Une autre sortie Hygrophore
Peut-être
A bientôt
Pour de nouvelles aventures mycologiques.

Liste des espèces observées.

Références citées :
* The Genus Hygrocybe, David Boertmann, Fungi of Northern Europe, 2010
** PROTOCOLE STANDARDISÉ D’ÉTUDE DES CHAMPIGNONS DES PELOUSES ET PRAIRIES MAIGRES, LES « CHEGD » (CLAVAIRES, HYGROCYBES, ENTOLOMES, GÉOGLOSSES, DERMOLOMES)
*** Les Hygrocybes de pelouses sèches pour le diagnostic terrain

Et merci aux auteurs des belles photos : Nathalie Volevatch, Camille Anceau, Émilie Dechaize, Frédéric Suffert, Chantal Bongiorno, Christelle Rouaud, Frédéric Della Guista, Patricia Pierson & Étienne Varney :

info portfolio

Groupe Matin Hygrocybe quieta Allée Allée Hygrocybe smartphonisé Cuphophyllus virgineus var. ochraceopallidus Hygrocybe konradii Hygrocybe coccinea Hygrocybe insipida Cuphophyllus virgineus Hygrocybe quieta Hygrocybe conica Hygrocybe mucronella Hygrocybe mucronella Gliophorus psittacinus Observation de têtes de moine Cuphophyllus virgineus Cuphophyllus pratensis Cuphophyllus pratensis Atheniella flavoalba Erable Hygrocybe quieta, spores Lactarius lacunarum Mycena aetites Volvopluteus gloiocephalus Volvopluteus gloiocephalus Mycena acicula Puccinia alnetorum Puccinia lagenophorae Puccinia lagenophorae Conocybe sp. Hygrocybe mucronella, spore Entoloma kuehnerianum Entoloma kuehnerianum Coprinopsis picacea Agaricus campestris Clathrus archeri Bolbitius titubans Lepista saeva Pelouse Hygrocybe mucronella, spores Infundibulicybe geotropa Infundibulicybe geotropa en fleur Pluie sur une Mycène Stropharia coronilla Clavulinopsis luteoalba Observation attentive Entoloma kuehnerianum Hygrocybe mucronella Gliophorus psittacinus Parasola plicatilis Hohenbuehelia geogenia Hohenbuehelia geogenia - cystide

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