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Réserve Naturelle Nationale de Saint-Quentin-en-Yvelines - 06 novembre 2021

Sortie mycologique dans la Réserve Naturelle Nationale de Saint-Quentin-en-Yvelines

par Frédéric Della Giusta

Nous étions quasiment une vingtaine de personnes à répondre au double appel de l’ANY et de la Réserve Naturelle des Etangs et Rigoles d’Yveline rattachée à l’Ile de Loisirs de Saint-Quentin-en-Yvelines et qui englobe depuis avril 2021 l’ancienne Réserve naturelle nationale de Saint-Quentin-en-Yvelines.
Si vous êtes rompu aux organisations en poupées russes et à l’aise avec la description qui précède, tant mieux. Si vous n’avez pas tout suivi, ce n’est pas très grave car le sujet de la journée était... le champignon. Encore et toujours. Ceci dit, je reformule, pour garder tout le monde à bord de ce compte-rendu : les champignons se trouvent dans la Reserve de Saint Quentin en Yvelines, qui fait désormais partie de la Reserve Naturelle des Etangs et Rigoles d’Yveline, est gérée et se situe géographiquement à l’Ile de Loisirs. Tout s’éclaire quand on prend le temps d’expliquer.

Mais revenons à nos champi-moutons, objet de toutes nos convoitises et de cette sortie. Avant d’entamer la description de ce monde fantastique qui s’offrait ce samedi à la découverte de notre groupe essentiellement composés de jeunes padawans, commençons par rappeler qu’il faut être correctement armé pour l’affronter sans peur. Parmi les nombreux guides de mycologie qui fleurissent les étagères des bonnes librairies, trois d’entre eux sont particulièrement recommandables à qui souhaite un kit de survie raisonnable, ni trop léger, ni trop indigeste ; il s’agit de :

  • Guide des champignons - France et Europe, de Guillaume Eyssartier et Pierre Roux, aux éditions Belin. 4e édition. Très riche d’espèces et d’informaion, avec des photos complétant avantageusement les clefs et critères d’identification. La référence désormais chez les mycologues.
  • Guide des champignons de France et d’Europe, de Régis Courtecuisse et Bernard Duhem, aux éditions Delachaux et Niestlé. D’un format un peu plus compact que le précédent, qui met à profit des dessins et non des photos de champignons, dessins qui savent mettre en valeur les critères essentiels d’identification. Référence avant que le guide Eyssartier&Roux ne s’impose, mais qui reste "au top".
  • Champignons de France et d’Europe occidentale, de Marcel Bon, aux éditions Flammarion. Cet ouvrage est très compact mais très complet en terme d’espèces répertoriées (un peu moins que les 2 précédents mais suffisamment pour s’en satisfaire des années). Son avantage, hormis sa compacité, est de mon point de vue la représentation des spores, utile quand on commence la microscopie pour assurer une identification. Il exploite également des dessins de champignons plutôt que des photos.

Le choix entre l’un des trois est affaire de préférence personnelle. Il est conseillé d’aller dans une grande librairie et de feuilleter ces ouvrages, puis de choisir celui qui fait écho à sa sensibilité (photos versus dessins, complétude de l’information versus compacité). Et quand on aime, on ne compte pas : j’ai les trois.

En ce samedi donc, la température est relativement clémente avec 10 degrés, un ciel bleu et un rayon de soleil, mais le ressenti est inférieur, sans doute en raison de l’humidité et de l’ombre apportée par les sous-bois dans lesquels nous évoluons. Avant même de commencer la visite de la réserve proprement dite, dont l’histoire nous est contée par Cyril, sympathique maître des lieux, on découvre une espèce intéressante poussant sur les blocs de bétons délimitant les places de parking, parmi les mousses : Arrhenia rickenii, jolie petite omphale beige foncé d’environ 2 cm de hauteur, gracieuse, à lames fourchues et chapeau strié.

Arrhenia rickenii - Omphale de Ricken

C’est l’occasion de préciser à tout notre auditoire, composé pour la majorité de néophytes, que les champignons sont désignés par un nom (réputé) latin constitué d’un nom de genre (ici Arrehnia) en majuscule, suivi du nom d’espèce(ici rickenii). Pour approfondir ses connaissances de l’histoire se cachant derrière l’usage de ces noms binomiaux, on pourra butiner sur le web et sur wikipedia en particulier. On n’en dira pas plus ici.

Une fois dans le périmètre de la réserve close de hautes barrières, on attaque la visite par la face nord... au sens figuré évidemment, c’est à dire par un os. En effet, nous accueille une psathyrelle, genre redoutable qui nécessite souvent l’usage du microscope pour étudier les différents caractères (taille et forme des spores, présence taille et forme de cellules caractéristiques nommée cystides, etc). Notre psathyrelle d’ailleurs restera sans nom, faute de temps pour pousser l’étude même revenus à la maison. Pour réviser le chapitre précédent, disons qu’on sait déterminer facilement le genre de ce champignon (Psathyrella) par sa silhouette reconnaissable et ses lames noirâtres, mais on ne saura pas dire de quelle espèce il s’agit (Psathyrella corrugis ? Psathyrella pseudogracilis ? autre ?). La mycologie, ce n’est pas toujours aussi facile que de faire rissoler une poêlée de giroles...
Et comme pour nous défier davantage, la réserve enchaine en nous proposant un champignon du genre Melanoleuca, autre genre redoutable qui reste affaire des plus intrépides spécialistes. Il aura fallu plus de deux heures de microscopie et de consultation d’ouvrages spécialisés pour proposer comme nom Melanoleuca polioleuca, avec un taux de certitude d’environ 90%... On n’a rarement de certitudes avec certains genres difficiles. C’est parfois frustrant, mais c’est ce qui donne son charme à la mycologie !

Le reste de la visite pose moins de problèmes, ou devrais-je dire, moins de problème à Etienne, ceinture noire 5e Dan et Grand Maître es champignons. Parmi les espèces notables répertoriées, citons :

  • Rhodotus palmatus, de couleur orange abricot et une odeur de même (ou à tout le moins fortement aromatique)
  • Chlorociboria aeruginascens, la pézize turquoise, toujours impressionnante tant par sa couleur que par la multitude des cupules qui se développent sur un tronc d’arbre mort.
  • Galerina marginata, champignon mortel qu’on a déjà décrit dans le compte-rendu de la visite en Foret de Saint-Germain à Achères. Ce redoutable champignon poussait d’ailleurs ici en quantité impressionnante
  • Lycoperdon perlatum, d’un âge très avancé et qui aura amusé les petits et les grands quand on aura expulsé un nuage de spores en le pressant entre les doigts
  • Mycena acicula, minuscule mycène orange débusquée par un mycologue en devenir, très prometteur, et à l’œil très affuté.
  • Auricula auricularia-judae, l’oreille de Judas, en référence à sa forme d’une part et au fait que ce champignon montre une préférence pour le sureau, arbuste qui aurait servi a Judas Iscariote pour se pendre.
Auricularia auricula-judae - Oreille de juda

58 espèces ont été identifiées au final (voir la liste des espèces observées), ce qui est honorable en cette saison mycologique qui touche à sa fin. Les première gelées signent en effet la fin de la partie pour la majorité des champignons. Ne restera guère que les hygrophores pour combler notre envie irrésistible de champignons. Et le hasard et l’ANY faisant bien les choses, la prochaine sortie ce dimanche 14 novembre leur est dédiée.
La diversité des espèces inscrite ce jour à notre inventaire permet d’ailleurs d’expliquer à l’auditoire captivé qu’il existe trois catégories de champignons :

  • des champignons saprophytes ou saprotrophes, c’est à dire qui se nourrissent de matière morte.
  • des champignons parasites, qui se servent sans demander, se nourrissant des supports vivants (arbres, plantes, etc) sur lesquels ils croissent
  • des champignons mycorhyziens, du grec myco, « champignon » et rhiza, « racine », qui s’associent en mêlant leur mycélium aux racines des végétaux et échangent avec eux des nutriments pour leur bénéfice mutuel, le champignon fournissant eau et sel minéraux, le végétal fournissant des sucres.

Quel monde fantastique !

La visite s’achèvera par un satisfecit exprimé par l’ensemble des membres du groupe quand à l’intérêt et la richesse de la sortie, et par la promesse, comme entre amis à chaque fin de vacances, qu’on se reverrait bientôt.

info portfolio

Message de bienvenue, sur le parking de la réserve Arrhenia rickenii - lames fourchues Arrhenia rickenii - Omphale de Ricken Arrhenia rickenii - Chapeau strié par transparence Chlorophyllum rhacodes - Lépiote déguenillée Clavulina coralloides - Clavaire à crêtes Clitocybe nebularis - Clitocybe nébuleux Clitocybe phyllophila - Clitocybe des feuilles Gymnopus fusipes (syn. Collybia f.) - Collybie à pied en fuseau Cortinarius ochroleucus - Cortinaire ocre blanc Cortinarius safranopes Daedaleopsis confragosa - Tramète rougissante Exidia glandulosa - Exidie glanduleuse Exidia thuretiana - Exidie portière Fistulina hepatica - Langue de boeuf Fomitoporia punctata (Syn. Phellinus punctatus) Galerina marginata - Galère marginée Galerina marginata - Galère marginée Galerina marginata - Galère marginée Gymnopilus spectabilis - Pholiote remarquable Inocybe geophylla - Inocybe à lames terreuses Lepista flaccida (Syn. Paralepista f.) - Clitocybe inversé des feuillus Lepista nuda - Pied-bleu Lycoperdon perlatum - Lycoperdon perlé Marasmiellus marealis - Marasme des rameaux Marasmius bulliardii - Marasme de Bulliard Mycena acicula - Mycène aiguille, Mycène rouge orange Mycena arcangeliana - Mycène olivâtre Mycena galericulata - Mycène en casque Pholiota squarrosa - Pholiote écailleuse Radulomyces molaris (Syn. Cerocortinum molare) Rhodotus palmatus - rhodotus réticulé Rhodotus palmatus - rhodotus réticulé Scleroderma verrucosum - Scléroderme verruqueux Tremella mesenterica - Trémelle mésentérique Xylaria hypoxylon - Xylaire du bois Cortinarius triomphans - Cortinaire triomphant, Cortinaire chaussé de jaune Exidia thuretiana - Exidie de Thuret Lycogala epidendrum - Lait de loup Melanoleuca polioleuca - Tricholome à chair brune Mycena pura - Mycène pure Phleogena faginea - Trémelle du hêtre Pluteus cervinus - Plutée couleur de cerf Bjerkandera fumosa - Tramète enfumée Armillaria mellea - Armillaire couleur de miel Coriolopsis gallica - Tramète des Gaules Gymnopylus spectabilis - Pholiote remarquable

titre documents joints