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Etang de la Porte Baudet - 06 novembre 2022

Sortie mycologique - Etang de la Porte Baudet

par Frédéric Della Giusta

Haro sur le Baudet !

La matinée s’annonçait bien. Après un difficile lever aux aurores (devoir s’extraire de son lit douillet, moelleux et chaud à 7 heures du matin un dimanche de novembre, c’est péché, c’est un crime, mais bon, on y consent pour la bonne cause et le progrès de la science !), douche, café, brioche, matériel dans la voiture, hop, nous voila partis pour la forêt de Rambouillet. Fleur au fusil malgré l’heure indue, on se réjouit de retrouver les amis (cueilleurs d’un jour, membres de l’ANY, champignons, arbres multicentenaires, animaux sauvages, etc), d’autant que le circuit de la Porte Baudet est toujours riche en récompenses mycologiques : lors de la sortie de Juin, on y avait récolté de pleins paniers de giroles (tiens, je vire Marseillais...).

la troupe rassemblée

La troupe ayant été briefée par Yves, maître de cérémonie du jour de la confrérie du champignon bienheureux, on se dirige doucement en direction de l’étang par le chemin bordé de hêtres. La progression est lente car les espèces sont nombreuses autant que les participants. Les allers-retours entre les sous-bois et Yves et Étienne, nos déterminateurs, se multiplient et s’enchainent sans relâche dans un rythme effréné et étourdissant. Après une quarantaine de minutes, on arrive enfin à l’étang, qui ne se trouve guère qu’à 200 ou 300 mètres du parking, c’est dire si on avance doucement. Si vous n’avez pas consulté le compte-rendu de la sortie de juin, je vous incite à y aller pour voir le contraste de couleurs entre l’été et l’automne. Autant c’est enchanteur au soleil, quand les arbres sont en feuille et bien verts, autant sous la pluie, disons le tout net, ça fout le bourdon...

L’étang, sous la pluie

Déluge en forêt de Rambouillet

A peine arrivés à l’étang, les portes du ciel s’entrouvrent et des trombes d’eau s’abattent sur nous, comme pour nous punir de ne pas être à la messe en ce dimanche matin. Certains courent aux voitures se munir de parapluie ou d’un imperméable ; piètres protections contre la pluie qui redouble d’intensité, comme pour nous faire comprendre qu’elle sera la plus forte. Mais bon, à coeurs vaillants rien d’impossible, nous sommes venus pour apprendre et récolter, on ira jusqu’au bout sans faiblir, « quoi qu’il en coute » comme dirait l’autre. On poursuit donc sur le chemin, on prend à gauche au bosquet de bouleaux, et on s’enfonce dans la forêt.
On y note quelques belles ou rares espèces : Amanita porphyria, l’Amanite porphyre, Oudemansiella mucida, la Collybie visqueuse qui pousse sur bois de hêtre mort
Et la plus redouble... Aucune accalmie à attendre ! On finit même par se demander si on ira au bout du circuit... et le froid qui commence à engourdir les doigts et les pieds (c’est qu’on se déplace guère vite, à 30, stoppés chaque mètre par un nouveau champignon à décrire et à nommer)... Il pleut, il pleut, bergère, rentre tes blancs moutons bien au chaud et revient quand il fera beau !
Quand soudain, on voit passer au loin une arche qu’on devine, au nez et à l’oreille, remplie de toutes sortes d’animaux. C’est Noé et sa famille, qui avait anticipé le déluge, lui. On ne s’en étonne même pas. On les salue, on les apostrophe, mais on n’entendra rien de leur réponses car nous avons soudain les oreilles remplies des hurlements tonitruants des trompettes du jugement dernier :

Craterellus cornucopioides - Trompette des morts

Un participant vient de découvrir un bouquet de trompettes des morts, Craterellus cornucopioides. Le sourire revient d’un coup sur les visages, la troupe s’égaye et s’égaille en tous sens, à la recherche de ce Saint Graal ! On se laisse une quinzaine de minutes pour assurer une bonne récolte, et la pluie redoublant encore (si vous avez bien suivi, ça nous fait fois six par rapport au déluge initial), on décide d’écourter le circuit et de couper en traversant le ruisseau à hauteur de la pinède. Mais là, patatra, encore de quoi nous ralentir : du cèpe à foison ! Du cèpe de Bordeaux Boletus edulis et du cèpe d’été Boletus aestivalis, qu’on récolte à la faux tellement il y en a (je forcis un peu le trait, uniquement pour fixer les idées).

y’a plus d’saison ma brave dame.

Cette semaine, en forêt de Marly, j’ai pu récolté un plein panier de cèpes d’été. Il s’agit du cousin du cèpe de Bordeaux, mais s’en distingue par un pied un peu plus sombre, réticulé d’un maillage blanc jusqu’en bas du pied (difficile à observer sans loupe) là ou le cèpe de Bordeaux aura un maillage uniquement en haut du pied, un chapeau sec (pas aujourd’hui...) alors que le cèpe de Bordeaux à un chapeau gras, et son parfum est plus fort, plus racé.
Aujourd’hui encore, à la porte Baudet, plusieurs cèpes d’été sont avidement récoltés, pour le plus grand bonheur des mycophiles. On peut tout de même s’interroger sur cette rencontre hors norme. Habituellement, on croise le cèpe d’été... en été ! Disons, de Juillet à Septembre, avec quelques rares excursions en Octobre, et deux inscriptions à l’inventaire de l’ANY en Novembre, en 2014 et 2019. Comme cet inventaire couvre environ 50000 récoltes sur une quarantaine d’année, on comprend qu’il se passe quelque chose d’assez peu orthodoxe. Encore un signe du réchauffement climatique sans aucun doute. Et en quoi ce serait étonnant puisqu’il a fait environ 26°C la semaine passée !

Boletus aestivalis - le bolet d’été !!!

Et voila que les dernières centaines de mètres sont vivement avalées. On ne s’arrêtera pas dans la pinède, ce sera pour l’an prochain, en espérant qu’il y fera alors un temps plus clément. Deux heures trente pour faire le circuit, c’est trente minutes de moins que d’habitude, mais deux heures de plus qu’on aurait dû raisonnablement y consacrer par ce temps déchainé.
Malgré cette pluie ininterrompue, l’ambiance était encore une fois excellente, la sortie très intéressante, et la récolte fort honorable et en tout cas suffisante pour satisfaire les mycologues et les mycophages. Allez, vite au chaud et au sec !

info portfolio

Amanita pantherina juvénile Amanita pantherina mature Amanita porphyria Amanita excelsa var spissa Amanita crocea Clavulina cristata Cortinarius eliator Crepidotus Hypholoma fasciculare Lactarius blennius, sous hêtre Ramaria stricta Paxillus ammoniavirescens Oudemansiella mucida (syn. Mucidulla mucida) Lactarius necator (syn. Lactarius plumbeus) Lactarius blennius, sous hêtre Mycena inclinata Duo d'amanites : Amanite panthère et A. rougissante (droite) Xylaria hypoxylon Plicaturopsis crispa Lactarius controversus Cyatus striatus Cratherellus sinuosus Recherches Cratherellus sinuosus Russula nigricans Chemin bucolique Helvella crispa Sous-bois Lenzites betulinus Hygrophorus cossus

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