par Frédéric Della Giusta
J’avais déjà eu l’occasion de partager ma préférence pour les hygrophores, champignons magnifiques, magiques, dans un récent article qui leur est consacré. J’y avais listé les espèces les plus courantes, en indiquant que la saison haute se situe de Novembre à Décembre. J’aurais du préciser que d’après les inventaires de l’ANY, on en trouve également entre Juin et Septembre ; mais il s’agit quasi exclusivement d’Hygrocybe conica et d’H. pseudoconica (synonymisés par certains auteurs, d’ailleurs), sauf très rare exception.
En ce vendredi 09 Juillet je décidai donc de tenter ma chance, et d’aller prospecter le parc du Château de Marly, haut lieu de l’hygrophore dans les Yvelines. L’été est en effet très humide, la température clémente, l’endroit propice, donc s’il doit y avoir quelque chose d’exceptionnel à trouver, c’est ici et maintenant. Au delà d’un pressentiment, c’est davantage le fait que ma pelouse se trouve cette année farcie d’Hygrocybe pseudoconica sans discontinuer depuis deux mois alors que je n’en avait pas vu un seul depuis plus de 10 ans, qui m’aura convaincu d’"aller à Marly".
Après un tour du parc assez peu fructueux hormis quelques Inocybes sous les grands tilleuls, je me rapproche de "L’endroit" avec un grand L, la place à hygrophores colorés. Dieu merci, une partie de la prairie sur les cotés avaient été fauchée, sans quoi on n’y aurait vu goutte. En effet, les plus hautes herbes y dépassent de loin le mètre de hauteur, interdisant de voir quoi que ce fut à hauteur de champignon. Donc là, à l’orée du bois, émergeant à peine des herbes, une merveille : une poignée d’Hygrocybe cantharellus, l’hygrophore chanterelle, d’une couleur orange très vive, et répartis sur moins d’un demi mètre carré.
Parmi les caractéristiques de ce champignon, citons pour commencer les lames décurrentes, c’est à dire se projetant loin le long du pied, comme une girole (chanterelle), d’où son nom.
Ensuite, le chapeau est tomenteux, recouvert de fines squames concolores au champignon. La couleur des squames est importante, car d’autres champignons similaires présentent des squames noirâtres, tels Hygrocybe coccineocrenata ou encore Hygrocybe turunda.
Au microscope, la caractéristique notable réside dans la surface des spores qui est légèrement mais assurément bosselée.
L’inventaire de l’ANY ne comporte qu’un enregistrement pour ce champignon, en forêt de Saint Germain, et remonte à 1950. C’est dire si la découverte est d’importance ! Hygrocybe Cantharellus mérite donc bien d’être mis à l’honneur et d’être désigné "Le Champignon du mois, Juillet 2021".
Passons maintenant à la description :
Chapeau
Orange vif, tomenteux (surtout visible à la loupe), avec des méchules oranges, hygrophane. Diamètre de 6 à 9 mm.
Pied
Orange, concolore au chapeau, virant au rouge-brun en séchant, avec une base feutrée blanche. L’aspect est un peu irisé et filandreux. De 4 à 6 cm.
Lames
Lames jaunes, espacées, avec une à deux lamellules par lame et souvent anastomosées avec ces dernières, fortement décurrentes.
Odeur
Aucune.
Sporée
Non observée mais donnée pour blanche.
Spores
Elliptiques à ovoïdes vues de face, quelques fois phaséoliformes (en forme de rein ou de haricot) vues de profile. Taille des spores : 9-11 x 5-6,5.
Basides
Tétrasporiques à long stérigmates très robustes (épais), 44-45x8-10µm.
Epicutis
Constitué de longs bâtonnets de 11 à 25 µm de grosseur, avec de toutes petites boucles entre deux.
Habitat
Prairies non amendées (le cas ici), ou espace boisé ouvert.
Comestibilité
Il est donné comestible par Bruno Ceto. Cependant, au vu de la rareté et de la taille ridicule du champignon, on s’abstiendra bien évidemment !
Références