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Etoile de Montaigu - 06 Juin 2021

Sortie mycologique en Forêt de Marly (Etoile de Montaigu) - 06 Juin 2021

Une douzaine de personnes s’étaient données rendez-vous ce Dimanche 06 Juin à l’Etoile de Montaigu en forêt de Marly, pour la première sortie mycologique depuis longtemps, bien trop longtemps. La dernière sortie date d’Octobre déjà, et depuis cette dernière, nous avons connu deux confinements COVID, un hiver très froid et un printemps du même bois, le tout peu propice à la mycologie de terrain en général et aux champignons en particulier...
Le temps est idéal, avec un soleil radieux réchauffant l’air et les esprits, une température clémente de 16°C malgré l’heure matinale et 21°C en fin de parcours à midi. Une succession d’orages dans la soirée de mercredi et la nuit de mercredi à jeudi a détrempé (voire gorgé d’eau) les sols, donnant beaucoup d’espoirs aux mycologues ici réunis.
Après un café de l’amitié bienvenu, et une fois les consignes de sécurité rappelées (masques, gestes barrière, distance de sécurité), nous commençons par la présentation de quelques champignons in-situ repérés la veille lors d’une sortie préparatoire, le tout à un jet de pierre du parking :

  • Trois Tricholomes jaunissants (Tricholoma scalpturatum) au bord du chemin de terre, entourés de charmes. L’occasion de rappeler que ce champignon est mycorhizique, c’est à dire que son mycélium est intimement lié aux racines des arbres environnant, assurant entre eux des échanges favorables à tous. Autant certains champignons vivent une association à un genre d’arbre déterminé, autant ce tricholome n’est pas difficile, puisqu’il s’associe aux hêtres, chênes, tilleuls (on en connait une station fidèle sous les tilleuls du parc de Marly), noisetiers, bouleaux, peupliers, et même les conifères, pins et épicéas.
  • Trois Inocybes maculés (Inosperma maculatum), au chapeau fibrilleux conique ondulé typique de ce genre. On est là face à un genre ingrat pour le mycophage, car il n’y a guère que l’Inocybe du Jura (Inosperma adaequatum) qui ait été considéré comestible par le passé et qui est dorénavant fortement déconseillé, sa comestibilité n’ayant pas été clairement établie... En revanche, il est plus clairement avéré que le printanier Inocybe de Patouillard (Inocybe patouillardii) est très toxique, voire mortel ! On note au passage que tous les inocybes sont mycorhiziques.
  • Trois Plutées couleur de cerf (Pluteus cervinus), un classique de la forêt de Marly, très commun, poussant sur bois mort. Ce champignon n’est pas mycorhizique comme les précédents, mais saprotrophe (ou saprophyte), c’est à dire se nourrissant exclusivement de matière morte. Tous les Pluteus partagent cette caractéristique. Ce champignon, bien qu’il soit très commun, est intéressant à deux titres : le premier est que ses lames, d’abord blanches, se teintent de rose à maturité. Il partage ce trait avec les Volvaires et les Entolomes. Le second n’est pas visible à l’œil nu et nécessite l’appui d’un microscope pour révéler des cystides qui me laissent à chaque fois rêveur. Quelques images valant plus qu’un long discours, on invite le lecteur à se référer au site de nos collègues mycologues canadiens de Mycoquebec. Allez voir, vous ne reviendrez pas indemne de cette visite ! Et pour ceux qui en reviendront transformés, n’ayez crainte, nous connaissons de très bonnes adresses de vendeurs de matériel optique...

Une fois ces trinités visitées (c’est dimanche, il y a peut être un lien mystérieux...), nous partons en prospection, au petit bonheur la chance, dans la chênaie-châtaigneraie acidophile. La récolte n’est finalement pas extraordinaire, que ce soit en quantité ou en diversité. Le weekend prochain devrait être ô combien plus riche en espèces au vu des températures annoncées cette semaine, et devrait probablement voir apparaitre le tant attendu cèpe d’été (Boletus aestivalis), cousin germain du cèpe de Bordeaux. Mais pour ce dimanche, une fois passés les polypores et tramètes ultra communs, les espèces intéressantes se concentrent dans :

  • le genre Pluteus, avec au total quatre espèces, ce qui est plutôt rare pour une même sortie, avec notamment Pluteus phlebophorus (syn. P chrysophaeus au sens de Kühner&Romagnesi) au chapeau brun de date, ridulé et au pied blanc jaunissant. Ce petit champignon nous aura causé bien de tracas, car il existe un P chrysophaeus (Schaeffer) qui à un chapeau jaune... un même nom pour deux champignons, problème assez commun en mycologie mais toujours déroutant.
  • un inocybe à spores étoilées (Inocybe asterospora), splendide espèce à observer au microscope. Ce champignon avait fait l’objet du Champignon de Novembre 2020. On ne saurait que trop conseiller d’aller y voir les photos de spores... stupéfiant, extraordinaire, ahurissant, bref, énoooorme !
  • des Agrocybe praecox un peu âgés déjà, sur bois raméal fragmenté (BRF). Pris pendant un temps pour Agrocybe rivulosa qui affectionne particulièrement le BRF, au chapeau ridulé radialement mais finalement assez semblable à A. praecox et d’autant plus que le champignon est décati comme ici, la microscopie a finalement tranché : A. rivulosa a des spores mesurant 10 à 14 µm de longueur pour 6,5 à 8 µm de largeur, A. praecox présente des spores de 8-10 x 5-6 µm selon la littérature. Ici, les spores ont été mesurées à 8-10(11)-5-6 *m avec une moyenne de 9,4 x 5,6 µm...
  • plusieurs myxomycètes, qui révèlent leur beauté à la photo macro
  • et finalement, de nombreuses "rouilles", qu’on croise souvent sans les voir, mais qui présentent une diversité et un mode de reproduction parfois complexe, et qui méritent en tous cas plus que l’attention fugace qu’on leur accorde parfois quand on les découvre sur les plantes de son potager. C’est l’occasion de souhaiter une chaleureuse bienvenue à l’ANY de Frédéric S, notre désormais spécialiste ès rouilles, et duquel nous nous réjouissons d’apprendre tout un pan de la science qui nous était jusque là inconnue (ou presque).

En fin de parcours, pour couronner une cueillette certes modeste mais intéressante, même si totalement dénuée d’intérêt culinaire, Jean-Pierre Fombeur nous fait l’amitié de nous dédicacer son ouvrage présentant ses "Meilleures recettes de champignons".

Bref, une sortie enrichissante, très agréable, qui aura fait le bonheur des familles et des spécialistes. On attend la prochaine avec impatience !

(Photos Frédéric Della Giusta, Frédéric Suffert, Étienne Varney)

info portfolio

En route pour la cueillette Hypholoma fasciculare - Hypholome en touffes Pluteus cervinus - Plutée couleur de cerf Schizophyllum commune - Schyzophylle commun Trametes versicolor - Tramète versicolore Tricholoma scalpturatum - Tricholome jaunissant Xylaria carpophila sur faînes de hêtre Xylaria carpophila Inocybe maculata - Inocybe maculé Mycena rosea - Mycène rose Pluteus boudieri - Plutée de Boudier Polyporus ciliatus (Syn. Lentinus substrictus) - Polypore cilié Xylaria hypoxylon - Xylaire du bois Tarzetta catinus Fomes fomentarius - Polypore amadouvier Inocybe asterospora - Cystides et spores étoilées Ceratiomyxa fruticulosa (myxomycète) Fuligo septica (Mycétozoaire) Lycogala epidendrum (myxomycète) Myxomycète indéterminé Epichloe sp (Ascomycète) formant quenouille sur graminée Irritation de paupière par le latex d'euphorbe Melampsora euphorbia-dulcis - Rouille de l'euphorbe épurge (Euphorbia lathyris) Puccinia ribesii-pendula - Rouille de la laiche pendante (Carex pendula) Puccinia urticata Uromyces hyacinthi - Rouille de la jacinthe des bois (Hyacinthoides non-scripta) Jean-Pierre Fombeur dédicace son ouvrage de recettes de champignons Ouvrage de Jean-Pierre Fombeur, disponible dans toutes les bonnes librairies Agrocybe praecox sur BRF

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